De l’importance de garder un contact positif avec les collaborateurs absents de longue durée
Publication 29 mai 2017

De l’importance de garder un contact positif avec les collaborateurs absents de longue durée

La problématique du retour au travail pour des travailleurs en absence de longue durée a été longuement évoquée ces derniers temps suite à l’entrée en vigueur au 1er janvier 2017 des nouvelles mesures concernant le trajet de réintégration des travailleurs en invalidité. Nous avons déjà présenté cette nouvelle procédure1, et le rôle primordial que doit désormais y jouer le médecin du travail. Pour compléter le trajet de réintégration proprement dit – qui est un trajet individuel –, une série de recommandations plus générales peuvent aider les employeurs à limiter tant que faire se peut la durée des absences et à permettre aux travailleurs de revenir au travail dans des conditions favorables, réfléchies et concertées.


Maintenir un contact positif pendant l’absence du travailleur

Garder un contact positif avec un collaborateur qui est absent de longue durée traduit divers objectifs de la part de l’employeur. Il s’agit :

  • D’abord et avant tout de manifester un intérêt à l’égard du collaborateur
  • D’entretenir le contact entre le collaborateur et l’entreprise
  • De rester au courant de l’évolution du processus de guérison et de la reprise possible du travail
  • De déterminer si les causes de l’absence sont liées ou non au travail, et de permettre ainsi d’initier le débat à ce sujet.

Garder ce contact doit évidemment se faire avec l’accord du collaborateur lui-même, et dans le respect de la vie privée du travailleur.

Ce contact peut être établi par divers interlocuteurs, que ce soit par le N+12, le service social, le service RH, la personne de confiance, etc.

Il peut prendre la forme :

  • D’un entretien téléphonique régulier. Celui-ci doit être bien préparé et se dérouler de manière empathique, et en prenant le temps nécessaire : l’écoute attentive du collaborateur est essentielle. Envisagez-le environ une fois toutes les deux semaines et tentez de respecter le déroulement suivant :
    • Commencez par poser des questions sur son état de santé (Exemples : Comment allez-vous ? Quels progrès avez-vous accomplis ? Avez-vous prévu une consultation de suivi chez le médecin ? Qu’a dit le docteur sur la durée de votre absence ?).
    • Montrez qu’il manque au sein de l’organisation, mais en veillant à ce que cela ne puisse être ressenti comme un reproche ou vécu comme une forme de pression. Faites-lui comprendre que vous comptez toujours sur un retour de sa part et aussi rapide que possible.
    • Expliquez-lui comment cela se passe au travail (suivi du traitement de ses dossiers, changements éventuels de structure, de règles, nouveaux clients …) Demandez par exemple: Y a-t-il quelque chose que vous vouliez savoir concernant ce qui se passe ici ?
    • Demandez-lui quand il espère revenir et convenez ensemble d’un nouveau contact (Exemples : Quand pensez-vous pouvoir reprendre le travail ? Dans combien de temps reprendrons-nous contact? Je vous appelle ou vous m’appelez ?)
    • Demandez-lui de venir vous voir le jour de son retour, si ce jour approche.
    • Proposez si nécessaire une visite du service social, du service d’encadrement RH ou auprès du conseiller en prévention - médecin du travail ou aspects psychosociaux.
  • D’un courrier : il s’agit dans ce cas essentiellement alors de l’informer des démarches administratives à devoir réaliser dans sa situation et des personnes-ressources à sa disposition (tant pour les aspects administratifs que d’écoute et de lien). Si la structure dispose d’un service social ou de personnes de confiance, il peut être indiqué que ces derniers envoient également un courrier plus « personnalisé » en leur expliquant leurs rôles et missions, et en stipulant qu’ils restent évidemment à leur disposition en cas de besoin. Il peut être judicieux, dans ce courrier, de les informer du fait qu'ils peuvent prendre contact avec la cellule psychosociale de leur SEPPT par e-mail sec.rim@cohezio.be  et par téléphone au 02 533 74 88 (FR) et au 02 533 74 44 (NL).
  • D’une visite à domicile : celle-ci doit évidemment n’être réalisée qu’après en avoir informé le collaborateur et obtenu son accord. Elle ne se réalise généralement qu'après une certaine période d'absence (30 jours en moyenne). Elle peut être réalisée par la personne de confiance, par un membre du service social, le N+1, l’un ou l’autre collègue, … en fonction des volontés du collaborateur absent.
    Attention, les personnes chargées de maintenir ce contact doivent absolument être formées en la matière.

Communiquer vers l’équipe

Lorsque vous êtes informés de la durée d’absence d’un collaborateur de votre équipe et que celle-ci s’annonce longue, il est important que le N+1 communique vers le reste de l’équipe. Il n’est pas nécessaire de rentrer dans les détails mais d’informer les collègues de la durée de l’absence, d’un possible repositionnement de l’équipe (reprise de dossiers urgents, etc.). Aussi, encourager et reconnaitre les efforts réalisés par l’équipe pour pallier les manquements relatifs à l’absence de l’employé malade est souvent bien pris.

De plus, si le travailleur absent prolonge son arrêt maladie, il conviendra peut être d’assurer son remplacement. En informer l’équipe est évidemment important.

Préparer et prévoir un entretien de retour

Cet entretien est une étape essentielle pour favoriser la transition vers le retour au travail.

Idéalement, le tête-à-tête devra avoir lieu le jour même du retour. En tant que N+1, veillez à bloquer une plage horaire suffisante dans votre agenda pour le mener. N’attaquez surtout pas bille en tête en demandant au collaborateur pourquoi il a été absent. Trop de managers sont tentés de chercher la «vraie» raison, en oubliant qu’ils n’ont pas à la connaître, car elle est d’ordre privé. Demandez-lui plutôt comment il se sent et comment il envisage la reprise. Evitez de lui tenir un discours sur les bienfaits du travail, qui sera presque toujours mal perçu.

Faites surtout sentir au collaborateur qu’il est le bienvenu. Il s’agit d’un entretien de retour et certainement pas correctif ! Prenez le temps qu’il faut, et tentez de respecter le déroulé suivant :

  • Informez-vous tout d’abord de la santé du collaborateur, mais évitez de parler de la maladie proprement dite. (Exemple : Bonjour, heureux de vous revoir parmi nous ! Comment allez-vous ? Comment vous sentez-vous ? En forme pour reprendre le travail ?)
  • Examinez avec lui s’il est en état d’effectuer toutes ses tâches.
  • Vérifiez si certains aspects de sa situation de travail peuvent être liés à sa maladie. Si c’est le cas, le cœur de l’entretien portera donc sur les causes éventuelles liées au travail : contenu du poste, conflits avec des collègues, des supérieurs ou des clients… Cherchez alors ensemble des solutions en lui proposant d’éventuels aménagements. S’il a émis le souhait de redémarrer en douceur, vous pourrez, avec son accord, alléger sa charge de travail pendant une période déterminée, quitte à redistribuer certains de ses dossiers aux autres membres de l’équipe, à revoir ses délais et à gérer vous-même d’éventuels clients mécontents. Autre option : assouplir provisoirement ses horaires, le temps qu’il reprenne ses marques. Mais attention à ne pas aller trop loin : les aménagements importants ne sont envisageables que dans le cadre d’une prescription médicale et avec l’accord des assurances. Pour les points épineux et conflictuels, n’hésitez pas à consulter les spécialistes : DRH, médecin du travail, juriste, conseiller en prévention … Si le collaborateur souffre de séquelles physiques (handicap, fragilité postopératoire…), ne tardez pas à aménager son poste de travail. Parfois, des adaptations minimes suffisent : rehausser un siège, modifier l’emplacement du bureau. Enfin, si l’arrêt est la conséquence d’un mal-être au travail, réfléchissez à un changement managérial, à des formations appropriées…
  • Discutez du travail, par exemple des modifications de la réglementation, de la méthode de travail, des nouveaux collègues. Informer le collaborateur des événements survenus en son absence permet de l’aider à se reconnecter à son environnement professionnel. Vous pouvez, en revanche, vous attarder davantage sur des faits relatifs à sa mission. Une bonne occasion de lui confirmer l’importance de son rôle. Si vous ne le faites pas, il risque de penser : «Que je sois là ou pas, on ne s’en aperçoit pas, la boutique tourne sans moi.» Ce qui encourage l’absentéisme. Revenez sur les contrats conclus, sur les perspectives de développement à court et moyen terme. Votre version des faits est d’autant plus importante qu’elle peut différer de celles des collègues. Enfin, gardez-vous d’exprimer l’embarras que son absence a causé («Tu nous as manqué, c’était dur sans toi»). Ce que vous prenez pour un compliment pourrait avoir des effets pervers, comme celui de culpabiliser le collaborateur.
  • Mettez-vous d'accord :
    • Consignez par écrit les accords passés
    • Remettez un double au collaborateur
  • Fixez avec lui une date pour un entretien de suivi

Après l’entretien, restez régulièrement en contact avec le collaborateur pour voir si le retour au travail se passe bien, en vous informant par exemple auprès de lui à la fin de la première journée de travail.
N’hésitez jamais non plus, si nécessaire, à faire appel aux personnes ou services suivants: service social, service RH, personne de confiance, conseiller en prévention, médecin du travail, …
 

1 : Réintégration des travailleurs en incapactié de travail : informations générales et procédure à suivre
2 : N+1 = Supérieur hiérarchique direct

Virginie Di Giamberardino
Conseillère en Prévention pour les Aspects psychosociaux

Publié dans Actuascan, mai 2017, n°5.